30 juin 2009

JE QUITTE TOULOUSE. PREMIERES IMPRESSIONS BI-NATIONALES


Faire ceci maintenant, fraîchement débarqué, est un peu prématuré. Pourquoi ? Parce que je ne suis pas encore vraiment atterri. Huit ans d'absence, ça change la vision des choses. Mais il n'y a pas que la vision des choses qui change : la ville, le pays, les gens ont beaucoup changé. Mais là, je m'aperçois que je vais trop vite car mes toutes premières impressions sont celles de l'Espagne, et pas question de croire que je las aie eues en Espagne, non, elles furent évidentes déjà à la gare routière de Toulouse lorsque le car (espagnol) y débarqua avec une heure de retard. Le type qui nous accueillit commença tout de suite à nous montrer sa couleur locale. Comme si il était une sorte d'ambassadeur espagnol in-itineris, il nous lança dès le départ un "Los que van pa' Madrí! Es por acá!". Ce qui s'en suivit, pendant quelques douze heures, fut une exhibition de traits culturels rassurants : eh ouais, l'Espagne est bel et bien ce à quoi je m'attendais : pas de politesse à la française, pas question de "s'il vous plaît" ou de "merci", non, en Espagne tout est de l'ordre du "Passe moi le sel !" ou "Viens ici !" (merde ! ce clavier "Qwerty" va à l'encontre de mes automatismes longuement acquis pendant mes huit ans de séjour en France et j'écris à chaque fois "Espqne" au lieu de "Espagne").
Mais j'ai quitté très rapidement l'Espagne car mon séjour en Argentine commença dès que, à l'aéroport de Barajas, j'ai mis un pied dans l'avion (un rassurant Boeing 747 heureusement car si jamais il s'eut agit d'un Airbus 340 ...). Les hôtesses de l'air nous accueillirent avec un "hola". Court, direct et clair : bienvenus dans le pays du tutoiement. Même si le prix de mon billet, acheté en ligne, ne m'autorise pas à m'en plaindre, la bouffe dans l'avion était en plastique. Mais bon, on a rien à faire dans un avion, alors on mange.
Et le moment si attendu est arrivé : on atterri ! Les larmes, qui se bousculaient déjà des heures avant et que je parvenais à maîtriser (los hombres no lloran, che!) furent autorisées, cette fois ci, à sortir un petit moment voir ce qui se passait ailleurs. J'arrivais dans le pays et ces larmes n'étaient-elles pas dues à un excèss de tendresse patriotique (cet anachronisme vivement dénoncé par l'esprit du néo-libéralisme ambiant) mais au fait d'être déjà à quelques heures de revoir mes enfants, mes frères et soeurs, ma mère ...
Bien que le trajet Buenos Aires/Córdoba ne prenne que 1 heure 20, la logistique de la ligne aérienne voulait que je passasse toute la matinée à Buenos Aires avant d'aborder le deuxième avion (toujours pas d'Airbus mais un Douglas machin truc ou quelque chose dans ce genre). Je me suis donc baladé toute la matinée dans l'aéroport, d'un bout à l'autre, pendant quelques quatre heures. Deux ou trois fois j'ai quitté l'aéroport pour traverser l'Avenida del Libertador et admirer ainsi les eaux mythologiques du Rio de la Plata, cette fleuve que Solís commença à remonter, il y a cinq siècles, en croyant qu'ils naviguaient encore sur l'océan et avant de s'apercevoir que l'eau était douce et qu'ils allaient inaugurer la célèbre grillade argentine mais du coté chaud de la grille cette fois là : ils se firent manger, par la suite, par je ne sais plus quels aborigènes. Quoi qu'il en soit, pendant un certain temps le Rio de la Plata fut connu du nom de Mar de Solís. Un aplauso para el asador, che!
Heureusement je n'avais pas cette image en tête au moment où j'ai dècidè de ne pas manger ce que l'aéroport propose aux prix forts que tout voyageur mérite mais une "hamburguesa" à l'exterieur, servie sur une serviette en papier par un "cholo", ces gens chez qui le sang indien coule à flots mais au bon endroit : dans leurs veines, et qui continuent à venir, qui du nord du pays, qui des pays frontaliers comme la Bolivie, le Paraguay ou le Chili, faire grossir les bidonvilles qui entourent toutes les villes Argentines. Du commerce équitable quoi. Je dépensai beaucoup moins (malin) et au même temps fit ma petite contribution à l'économie populaire locale (solidaire). Le prix ? Et bien : 5 pesos, c'est à dire environ 1 euro. J'étais déjà en Argentine mais pas en entier. Quelque part dans mon esprit j'étais encore en France (même avant de quitter l'Espagne j'avais eus du mal à ne pas parler en français aux gens) et il me fallait bien réfléchir avant de l'ouvrir.
Une très longue matinée mais le moment d'aborder l'avion d'Austral Líneas Aéreas fut arrivé.

20 juin 2009

PIG BROTHER ORGANISE SON FESTIVAL

Le lieu a été aménagé, ça se voit. A l'intérieur (que normalement est l'extérieur, c'est à dire un espace public avec tout ce que public veut dire) la foule commence à se rassembler. Des stands ont déjà poussé comme des champignons là où la pelouse s'étends le long de la rivière : "Pour se saouler la gueule ? C'est par ici, venez !", "Empiffre toi ! Des saucisses chaudes". Quelques sons annoncent déjà la couleur du festival. Des gens, surtout de très jeunes, affluent depuis tous les coins de la ville. Ils ont tous l'air d’être des gens qui volontiers se laissent caresser par les paroles douces des toutes les libertés. Pas besoin de leur poser des questions : leurs visages, leurs rires, leurs regards, des bouts de conversations entendus au hasard du vent vous diront qu'ils sont sensibles aux chants de la dignité humaine, de l'émancipation de l'individu, du rejet du tout sécuritaire et du tout pré-mâché. Leurs coeurs ont des battements supplémentaires qui enlèvent les derniers carcans survivants mais d’une autre ère. Leurs rêves portés comme autant de réalisations intérieures, leurs réalités possibles mais pour l'instant en herbe, les poussent vers l'entrée du lieu, cette espace public que l'espace de quelques jours est devenu privé. Comment fait-on un espace privé d’un espace public ? On met de barrières bien évidement. Et comment empêche-t-on aux gens de sauter par dessus ? On met des policiers bien entendu. Mais ces policiers ont l'air bizarre. Leurs uniformes ne sont pas ceux des policiers que la République veut qu’ils portent bien qu’ils en ont un air. Ces policiers, dans leur tenue étrangère aux fondamentaux de la République, sont un corps privé. Leurs têtes ne vous laissent pas indifférent : il y a celui qui, depuis ses épaules larges et sa démarche sûre et presque défiante, vous fera l'impression d'un mercenaire prêt à tout. Il y un autre que l'on dirait directement passé d'une ferme perdue quelque part dans la campagne aux rangs de cette armée qui dispute à la vraie police et aux lois républicaines l'exercice de cette forme claire de pouvoir qu'est la coértion ("T'as le choix : soit tu fais que je te dis de faire, soit je te passe à tabac"). Soyons juste : il y a aussi celui qui, toujours sur un corps baraqué, a une tête qui conviendrait mieux à un étudiant universitaire. Mais il est là pour casser des gueules s'il le faut, ça se voit.Et ceux jeunes gens qui, animés de leur élan de liberté, de justice, de dignité, en portant leurs étendards de luttes claires comme l'eau de pluie, en dansant aux rythmes et aux rires d'autres continents auxquels ils pilleraient volontiers leur joies, non pas pour leur en déposséder mais pour tout partager avec eux de cette folle joie d'humanité, ces gens qui veulent accéder à cette espace qui appartient à tous mais qui profite à peu, ces gens doivent se présenter d'abord auprès des non-policiers exerçant les fonctions des vrais policiers. Depuis son arrogance brutale et stupide, le non-policier vérifie que le jeune possède un ticket, condition logique pour accéder à un espace public confisqué au profit de très peu mais si la jeune personne porte un sac, il doit alors accepter de se faire fouiller. Peu importe qu'un droit pénal existe. Peu importe que les lois républicaines veulent que tout acte de fouille, indigne par principe, doit être justifié et d'aucune manière arbitraire, peu importe que cet acte est seulement autorisé aux forces légalement constituées, peu importe ... ces employés d'une boîte privée joueront aux grands seigneurs de la guerre et le peuple... le peuple acceptera. Je l'ai su il y a quelques années : plus jamais je ne mettrai un pied dans un festival quelconque. Même si le rio est loco d’une ivresse contagieuse.